La France essaie (à nouveau) de limiter l'accès aux sites porno

Par Anton Kunin | Mis à jour le 11/06/2020 à 10:45

Les sénateurs ont voté un amendement instaurant, sur le papier, un mécanisme qui rendrait les contenus pornographiques sur Internet inaccessibles aux mineurs. Dans les faits, il est inopérant.

Pornographie
Il existe une multitude de sites pornographiques sur Internet, grands et petits, pour les amateurs de tel ou tel genre.

Lutter contre des sites établis à l’étranger, une bataille perdue d’avance

Dans la nuit du 9 au 10 juin 2020, les sénateurs ont voté un amendement au projet de loi visant à protéger les victimes de violences conjugales. Son article 11 bis A confère au président du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) le pouvoir de constater qu’un site pornographique est accessible aux mineurs, auquel cas il doit mettre ledit site en demeure de « prendre toute mesure de nature à empêcher l’accès des mineurs » à son contenu. Si ce n’est pas fait dans les 15 jours, le président du CSA peut saisir le président du tribunal judiciaire de Paris afin que ce dernier ordonne aux fournisseurs d’accès à Internet (FAI) de bloquer l’accès au site en question et enjoigne les moteurs de recherche à le déréférencer.

Dans les faits, cet amendement ne risque pas de changer quoi que ce soit. Le président du CSA peut adresser autant de mises en demeure qu’il veut, un site établi à l’étranger est régi par les lois de son pays d’implantation et n’a aucune obligation de se conformer au droit français. En effet, d’après les données d’Alexa, les sites pornographiques les plus visités par les internautes français sont Bongacams (8e site le plus visité en France, domicilié aux Pays-Bas), LiveJasmin (13e, Luxembourg), Chaturbate (18e, États-Unis), Pornhub (25e, Chypre) et Xhamster (41e, Chypre).

Si elle applique sa loi, la France risque de bloquer pas mal de sites

Autre aspect : l’amendement adopté par les sénateurs vise les personnes dont l’activité est d’éditer « un service de communication au public en ligne permettant à des mineurs d’avoir accès à des contenus pornographiques ». La définition englobe donc tous les sites hébergeant des contenus pornographiques, même si ce n’est pas leur visée principale. Cet amendement peut donc être utilisé pour viser des réseaux sociaux peu regardants sur les contenus qu’ils hébergent. En effet, dans le palmarès Alexa des sites les plus visités en France, on retrouve deux réseaux sociaux russes : à la 21e position, vk.com, et à la 39e position, ok.ru. Les deux réseaux sociaux hébergent un nombre impressionnant de vidéos pornographiques.

À noter que l’amendement n’oblige pas le président du CSA à passer ses journées à lutter contre les sites pornographiques. Il ne devra le faire que « lorsqu’il constate » que tel ou tel site est accessible aux mineurs. Et sur Internet, les sites pornographiques se comptent par centaines ! Restons donc réalistes : à moins qu’il veuille en faire son métier, le président du CSA n’aura pas intérêt à passer ses journées à constater quel tel ou tel site est accessible aux mineurs.

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